Causerie-débat sur les pirates somaliens dans le Minervois, vendredi 12 août

À la ferme-camping de Cravirola, près de Minerve, dans le même lieu magnifique où j’ai été invité à parler des Enragé-e-s le 12 juillet dernier — encore merci à mes hôtes et hôtesses pour leur accueil et leur écoute, et aux cigales pour l’accompagnement ! — des auteur-e-s du livre Frères de la Côte. Mémoire en défense des pirates somaliens, traqués par toutes les puissances du monde (L’Insomniaque éditeur), dont une édition revue et augmentée est parue récemment, viendront présenter leur ouvrage.

Ne ratez pas cette occasion de les rencontrer (et de découvrir ce lieu, si vous ne le connaissez pas) si vous avez la chance d’être dans la région le 12 août.

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Procès de pirates somaliens à Paris du 29 mars au 15 avril: solidarité!

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Nouvelle édition revue et augmentée.

Du 29 mars au 15 avril 2016 plusieurs pirates somaliens capturés par l’armée française en 2011, suite à l’abordage d’un bateau français seront jugés devant la cour d’assise de Paris.

C’est le moment de rappeler que dans ce pays qui est l’un des plus pauvres du monde et où l’espérance de vie est de cinquante ans, devenir pirate n’a rien de romantique. Si pour certains attaquer les bateaux étrangers qui pillent leurs côtes est un acte politique, pour la majorité de ceux qui se retrouvent désignés comme pirates, il s’agit avant tout d’une question de survie et du résultat d’une pauvreté extrême.

Il s’agit aussi d’avoir en tête que cette zone du globe qui sert à la fois de réserve de pêche et de dépotoir de déchets toxiques au monde entier est devenue un laboratoire d’expérimentation pour tous les militaires, paramilitaires et conseillers en sécurité de la planète.

Dans ce contexte une solidarité avec ceux qui sont désignés comme les pirates somaliens s’impose.

Un procès va se dérouler du 29 mars au 15 avril 2016 devant les assises de Paris, celui de l’abordage par des pirates somaliens du bateau français le Tribal Kat, en septembre 2011, au large de la Somalie. Dans ce procès, comme dans les trois autres procès en piraterie (Le Carré d’as, Le Ponant et La Tanit) qui ont eu lieu en France ces cinq dernières années, les méchants seront donc des Somaliens. C’est une telle évidence que ces derniers semblent condamnés d’avance.

Mais à y regarder de plus près les évidences sont trompeuses.

Ainsi, sur les neuf Somaliens qui ont tenté d’aborder le Tribal kat, deux ont été tués et les sept qui vont être jugés devaient toucher 100 euros pour leur participation à une attaque pirate. Une fortune dans un pays où le salaire moyen est de 1 ou 2 euros par jour.

Parmi ces sept enrôlés comme manœuvres, plusieurs étaient mineurs au moment des faits. Au cours des quatre ans et demi de prison préventive déjà effectués, l’un d’eux a perdu un poumon, un autre la raison. Tous venaient de familles très pauvres, ce qui, en Somalie, signifie souffrir littéralement de la faim. Mais nous dira t-on sans doute au procès, cela n’excuse rien.

Chaque jour, bateaux de plaisance, porte-conteneurs, supertankers et autres symboles flottants de richesses narguent les Somaliens en passant au large de leurs côtes. Mais ces navires ne font malheureusement pas que passer. Il y en a aussi, tels les thoniers français ou espagnols, qui s’ arrêtent pour y pratiquer une pêche à outrance selon des méthodes interdites en Europe. Ainsi le littoral somalien est quotidiennement ratissé et détruit sous protection des coalitions militaires du monde entier et notamment de l’armée française. Face au pillage organisé de leurs côtes, les petits pêcheurs traditionnels somaliens n’ont donc qu’à crever… ou devenir pirates !

Outre le fait qu’on vienne y voler leur poisson, les eaux territoriales somaliennes sont utilisées comme dépotoir pour y déverser les déchets toxiques du monde entier. Déverser en Somalie ou au large des côtes de tout autre pays pauvre plomb, mercure, pesticides ou déchets radioactifs ne coûte que 2$50 alors qu’un retraitement légal coûte entre 250 et 300 $ le baril… Que depuis 20 ans les populations des villages côtiers voient apparaître des maladies graves caractéristiques d’exposition au mercure ou à la radioactivité, cela ne fera jamais l’objet d’un quelconque procès…

Plus de 1 000 pirates somaliens, dont 22 en France, croupissent ou ont croupi dans des geôles à travers le monde, capturés par des militaires et conduits dans les pays des bateaux qu’ils ont abordés. La question de la piraterie somalienne a fait l’objet d’une instrumentalisation politique et militaire qui a des retentissements dans les salles d’audience. Ainsi, en général, les pirates sont lourdement condamnés.

Dans ce contexte, le collectif Iskashato a écrit un livre Frères de la côte (L’Insomniaque, 126 p., 14 €), dont tous les bénéfices sont reversés aux pirates actuellement dans les prisons françaises.

J’ai dit tout le bien que je pense de ce livre sur le présent blogue.

Une édition augmentée et actualisée vient de sortir, Iskashato tente d’y analyser le phénomène de la piraterie en Somalie et la réaction mondialisée qu’elle a suscitée avec un point de vue explicitement solidaire et empathique des pirates.

Et toujours avoir en tête cette phrase de Bellamy à son procès en 1720 : «Ils nous condamnent, ces crapules, alors que la seule différence entre eux et nous, c’est qu’ils volent les pauvres sous couvert de la loi alors que nous pillons les riches armés de notre seul courage.»

De la Somalie et de l’océan Indien comme lieux d’exercice de la piraterie capitaliste internationale (2013)

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rois somaliens âgés de 26 à 31 ans, accusés d’avoir pris en otage en 2009 les occupants du voilier Tanit, viennent d’être condamnés à Rennes à neuf ans de prison. L’avocate générale — qui exerce un dur métier — a estimé qu’ils avaient obéi à une motivation : « l’argent facile ». Comment se fait-il que des jeunes gens nés dans l’un des pays les plus misérables de la planète se trouvent en situation d’être kidnappés dans l’océan Indien pour être jugés et emprisonnés en France ? Un ouvrage collectif récent, intitulé Frères de la côte. Mémoire en défense des pirates somaliens, traqués par toutes les puissances du monde, publié par L’Insomniaque, fournit de précieux éléments de réponse.

Lorsque l’une des personnes membres du collectif Iskashato — terme qui signifie à peu près en somali « groupe de production et de partage » — a évoqué devant moi un travail entrepris sur les procès menés à l’encontre de pirates somaliens, j’avoue que ma première réaction a été d’étonnement dubitatif. Pire, le rapprochement entre la piraterie « historique », à l’étude de laquelle les travaux de Marcus Rediker ont donné toute sa place dans l’histoire sociale[1] et des opérations aux allures mafieuses me semblait forcé. Ceci n’est jamais que la énième illustration de la règle selon laquelle l’intuition (et encore moins le « bon sens ») ne suffit pas pour se faire une idée d’un sujet dont on ignore tout.

À la suite de la conversation ci-dessus évoquée, j’ai pris la peine de me renseigner sur des procès passés ou en cours. Enfin, la lecture du remarquable petit ouvrage publié par L’Insomniaque sous le titre Frères de la côte a achevé de me convaincre de mon erreur, au moins quant à l’intérêt du sujet.

Remarquable, dis-je, tant les auteur(e)s ont réussi à réunir et restituer clairement en moins de cent pages une moisson d’informations historiques, géopolitiques, économiques et juridiques sur une région du monde qui concentre bien malgré elle tous les maux du capitalisme moderne.

Il n’est pas inutile de rappeler aux lecteurs et lectrices français — avant d’en venir à la piraterie somalienne — des données concernant l’importance économique du domaine maritime de la France, dont le moins qu’on puisse dire est qu’elles ne font pas partie de la culture générale. Lorsque l’on pense pêche et côtes, on évoque les rivages de l’Atlantique, de la mer du Nord et de la Méditerranée, la sardine de La Turballe, le fret de Marseille, et le passé négrier de Bordeaux et de Nantes. On ignore généralement que la France possède le deuxième espace maritime mondial, avec environ 11 millions de kilomètres carrés. Dans l’Océan indien — ce qui nous ramène à la Somalie —, on compte que la France dispose d’un espace maritime dont la superficie équivaut à cinq fois celle de l’hexagone. Lire la suite